Je participe régulièrement à des événements organisés par « Anonymous for the Voiceless », qui veut dire « anonyme pour les sans-voix ». La mission de ce groupe est d’exposer de façon paisible et respectueuse au public les faits et la réalité de l’exploitation animale sous toutes ses formes dans le but de « donner une voix » aux animaux qui n’ont aucune « voix » pour parler de leur sort dans notre « système ». Outre les organisateurs-gestionnaires de la « logistique », les activistes qui participent ont deux rôles, qu’ils s’échangent par tranches variables de temps pendant l’événement, selon les forces, préférences, et besoins : tenir des écrans ou des affiches (« Cubeur ») et parler avec le public (« outreacher », ou « sensibilisateur »). Les sensibilisateurs doivent suivre une formation sur l’échange respectueux, calme, cohérent, logique et sans jugement avant d’occuper cette position et avoir l’information requise pour échanger de façon pertinente. « Escalader un débat » est très mal vu et tout sensibilisateur qui se rend à l’escalade même modérée se fera avertir une fois et se fera remercier si ça recommence, même quand le tout est « commencé par le passant qui voulait en découdre ». Ça n’empêche pas des échanges parfois « délicats » où les « vraies choses sont dites » assez directement, mais c’est toujours dans l’échange et l’éducation, avec de l’information rigoureuse et documentée. Un passant qui veut crier et débattre férocement se fera ignorer et on lui demandera poliment de bien vouloir quitter, puisque cet événement n’est PAS une confrontation ni une affaire de « débat », mais bien d’échange, d’éducation et de sensibilisation paisible, calme et de bonne foi. J’encourage donc tout non-végane à visiter les Cubes et à parler aux « sensibilisateurs ». Vous aimerez votre conversation, j’en suis certain. Comme dans n’importe quel domaine, il y a des sensibilisateurs meilleurs que d’autres, mais la qualité est généralement très bonne et les sensibilisateurs sont majoritairement calmes, pertinents, informés et agréables. Vous trouverez des sensibilisateurs qui parlent anglais et français dans tous les Cubes au Québec et Ottawa, et espagnol et même autres langues dans les Cubes de Montréal. Certains passants ne remarquent même pas les images qui passent sur les écrans, d’autres les voient et marchent plus vite pour éviter le Cube, d’autres s’arrêtent un peu et repartent, d’autres s’arrêtent et restent plus longtemps, très souvent avec un air assez « surpris / en choc / pensif / perplexe ». Certains se mettent à pleurer et « n’en reviennent pas ». Les réactions sont variées et toujours « cas-par-cas », évidemment. Quand les gens le veulent, ils et elles peuvent discuter avec un sensibilisateur, mais vous pouvez aussi dire que vous ne voulez pas parler et juste regarder les écrans et ils vous laisseront en paix. Les vidéos qui tournent montrent les pratiques « normales et mondiales » dans l’élevage et l’abattage, surtout pour les animaux de viande, lait, œufs, vêtements. Bien que l’exploitation animale s’étende bien au-delà de ça, nous nous concentrons surtout sur ces « sujets », sinon nous n’en finirions jamais. Nous concentrons les efforts sur les pratiques normales des pays industrialisés comme au Canada, mais les pratiques dans les autres pays sont pires encore. Ces « scènes » sont encore une fois « normales et banales » dans le monde de l’exploitation animale, ce qui nous a été confirmé maintes et maintes fois par des livres entiers de documentation sur le sujet écrits par d’anciens inspecteurs et éleveurs, des milliers d’heures de caméras cachées, d’anciens travailleurs d’abattoirs et d’élevages à qui nous avons parlés, qui ont même souvent ajouté que ce que nous montrons, « c’est rien du tout comparé à ce que j’ai vu et entendu »… Les manipulations « normales » des animaux sont cruelles par obligation et par construction, même dans les « meilleures conditions », ce dont je parle dans mon texte « La viande éthique et locale ». Une fois qu’on « fouille ce dossier » rigoureusement, on réalise pourquoi ceci est le cas. Mais il y a DEUX réactions tellement fréquentes que ça vaut la peine d’en parler spécifiquement plus en détails : 1) « c’est pas comme ça ici voyons » et 2) « le problème c’est le mauvais traitement, il faut réglementer tout ça beaucoup plus ». Systématiquement. « C’est pas comme ça ici » est particulièrement répandu au Québec, en France, en Belgique et en Suisse. Les gens pensent que, miraculeusement, les humains « ici » sont plus gentils, étrangement « différents » et plus attentionnés que tout le reste de la planète, etc. C’est une illusion. Oui, C’EST « comme ça » ici aussi. Cette illusion vient de campagnes de marketing et d’image qui entretiennent le mythe du « gentil éleveur bienveillant » avec ses animaux, de « l’élevage de terroir », du petit éleveur avec ses 5 vaches et 2 cochons, ou même des plus grosses opérations qui « ont à cœur le bien-être de leurs animaux », etc. Soyons clairs : les animaux exploités dans les élevages sont « bien nourris », « soignés » et « hébergés » autant qu’il le faut pour préserver la profitabilité jusqu’au moment de transport vers l’abattoir, ce qui est le « plein poids de viande ». Notons que les vaches laitières sont exploitées jusqu’à la baisse de production de lait après une vie atroce et finissent toutes à l’abattoir aussi. Même dans les petits élevages « du terroir ». Même chose pour les poules pondeuses. L’animal est vu comme un produit, pas comme un membre de famille. La « cruauté gratuite » varie, mais est aussi très répandue. Pour comprendre pourquoi la cruauté et l’absence d’empathie est TRES répandue, il faut s’arrêter pour réfléchir plus profondément au contexte dans lequel tout ceci se fait, ce qui n’est pas le but de ce texte. Cela dit, il est indéniable que certains éleveurs ne font que « le travail normal », qui est par design « cruel », pas par « volonté » ou par méchanceté, mais bien par nécessité. C’est-à-dire que ces éleveurs et leurs employés « font leur travail », c’est tout. Il se trouve que les animaux qui sont « le produit » sont soumis à un ensemble de manipulations, conditions de vie, conditions de transport et mise à mort passablement atroces et souffrent bel et bien, à la fois psychologiquement et physiquement, comme n’importe quel chien ou chat souffrirait dans les mêmes conditions. Nous nous faisons parfois « accuser » de montrer des « cas spéciaux ». Pourtant, ces pratiques sont normales et banales : broyages ou gazage ou jettage vivant aux poubelles des poussins mâles dans les oeufs, poules entassées les unes sur les autres et ultra stressées et en panique permanente « en liberté » ou bien dans des cages grosses comme une feuille de papier standard, manipulation d’éclairage pour causer un « état de panique » qui augmente la production d’œufs, bébés enlevés aux mères laitières et abattus, « organisation et fonctionnement » des abattoirs, castration à vif, tuerie des bébés souvent devant leur mère, tuerie sans façon des individus malades, trainage des individus avec pattes cassées ou autres incapacités (ou figés de terreur) jusqu’à la ligne de mort dans l’abattoir, etc etc etc. La liste de ce que constitue « le travail normal » ferait un énorme livre complet et le tout est très bien documenté, preuves et témoignages à l’appui. Restons synthétiques : OUI, « c’est comme ça » ici, et NON, ce n’est pas « spécial ». Les éleveurs, opérateurs d’abattoirs et autres intervenants qui tirent profit de l’exploitation animale vont dire le contraire… évidemment! Il faut s’y attendre! Nous ferions pareil à leur place! Ils vont même vous inviter à des « visites de la ferme », qui ne sont que voile d’illusion bien orchestré. Donc, on résume : OUI, « c’est comme ça » ici aussi. Lisez mon texte « La viande éthique et locale » pour plus de détails et mon texte « L’assiette végane est-elle vraiment moins cruelle et destructrice » pour des infos additionnelles, surtout sur l’environnement. « Le problème est le mauvais traitement » est toujours ce qui suit la mise à nue des faits et de la réalité de la phase de discussion sur le sujet du « c’est pas comme ça ici ». Ainsi, selon cette logique, si on pouvait seulement arriver à « exploiter gentiment » les animaux, alors consommer des produits animaux serait correct. Il y a deux réponses à cette « justification », chacune étant suffisante en elle-même, mais les deux ensembles étant encore plus « béton » : 1) c’est tellement déconnecté de la réalité qu’il est difficile de trouver les mots pour expliquer à quel point cette pensée tient des bisounours et de la Fée des dents et 2) il y a encore une impasse éthique fondamentale, même avec « bon traitement ». C’est déconnecté de la réalité car le volume est tellement gigantesque qu’il est impossible au niveau logistique de faire le tout « gentiment », même si tout le monde réduisait dramatiquement sa consommation. Il faut être très mal informé pour penser que le volume existant peut ressembler à quelque chose des beaux films nostalgiques et trompeurs de Hollywood et du « bon vieux temps ». Principe simple : profit + humains + animaux = pas bon pour les animaux. Même pour de petits profits. De plus, beaucoup des manipulations normales dans les meilleures conditions SONT cruelles par design et sont incontournables. Ne pas savoir et ne pas vouloir savoir les « détails importants » de l’exploitation animale, animal-par-animal et produit-par-produit ne fait pas en sorte que ça n’existe pas. Après des générations d’enquêtes, des centaines de livres et des milliers d’articles et heures de vidéos, il est clair que « l’exploitation gentille » d’animaux n’est que le fruit de nostalgie d’un temps ancien avec le « gentil berger » et toute cette famille Disneylandesque, qui représente au mieux significativement moins de 1% de tous les produits animaux et qui sont quand-même de l’exploitation d’êtres sensibles comme tout chien ou chat. Et tant qu’à avoir de la viande de porc et vache et autres « gentiment traités et tués », ouvrons aussi des abattoirs et élevages « gentils » de chiens et de chats et de chevaux. Où est le problème? C’est ce que j’explique dans « Le spécisme ». Ça fait 50 ans qu’il y a des débats et « combats pour un meilleur traitement des animaux » et voyez le résultat : RIEN DU TOUT! C’est un méga show d’horreur totale. Ça existe pour les profits des exploiteurs et la « bonne conscience » des consommateurs. PAS pour les animaux. Après 50 ans de « combats acharnés » pour « bien traiter » les animaux exploités par les plus passionnés et experts du sujet, rien de significatif n’a changé. Il me semble que juste ça est une belle preuve que tout cela n’est que « bonne conscience » et « bien pensance »… En plus d’être déconnecté de la réalité, il est impossible de justifier de mettre au monde des animaux dans le seul but de les exploiter et tuer, alors que c’est évitable. SI nous DEVIONS exploiter et tuer des animaux pour vivre ou même juste pour prospérer, alors le débat serait inutile. Or, 99% de l’exploitation animale aujourd’hui est évitable. Comme je l’explique dans « Les animaux ont-ils des émotions », ces animaux sont, rappelons-le, des êtres sensibles avec émotions, désir de vivre et capacité à faire l’expérience de la vie. Il n’est pas justifiable de perpétuer un système d’exploitation et de tuerie par le plaisir gustatif, l’amusement ou les habitudes. Puisque les humains peuvent très bien vivre sans nourriture de source animale, sans vêtements de source animale et sans « amusement et loisir » basé sur les animaux (cirques, zoos, etc.), il découle donc que la seule « justification » que nous avons pour leur exploitation est que nous sommes plus puissants, ce qui est de l’oppression. Les « Blancs » avaient plus de puissance militaire et organisationnelle que les « Noirs » et les autochtones, ce qui « justifiait » tout un système de croyances, traditions et pratiques oppressives. Même chose pour l’oppression des femmes par les hommes, des gays et autres « marginaux » par les majorités hétérosexuelles, l’oppression des enfants par leurs parents pendant des milliers d’années, l’oppression des peuples par les rois et leurs armées, l’oppression des gens en Inde par les britanniques et des « colonies » en général par les pays colonisateurs et ainsi de suite. Le surnombre et la supériorité de puissance ne peuvent pas justifier l’exploitation d’êtres sensibles dont la vie est importante pour eux et elles. Même si ce FUT le cas dans le passé, ça doit changer maintenant, surtout quand le tout ne fait plus "avancer" l'Humanité ou le bien-être humain ou la cause environnementale. Au contraire.
Si la chasse de trophées, les tueries d’éléphants ou de phoques ou de girafes ou les combats de chiens sont « injustifiables », consommer des produits animaux ne l’est pas non plus. Pourquoi? Parce que la logique est d’éviter de causer souffrance et/ou mort évitable, et les produits animaux SONT bel et bien « évitables ». Le plaisir gustatif et les habitudes ne sont pas des justifications assez solides pour perpétuer autant de souffrance, de tuerie et de destruction. Pascal Bédard lechoixv@gmail.com Note: les photos de cet article sont de 2 super photographes-activistes: Victoria de Martigny et Felix Sieder. Documentaires suggérés, disponibles sur YouTube ou Netflix ou recherche Google : The Game Changers What You Eat Matters Forks Over Knives Cowspiracy Peaceable Kingdom: The Journey Home Dominion Earthlings Dairy is Scary What’s Wrong With Eggs? The Cruelty Behind Our Clothing
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